Couleur Café 2025 – Vendredi 27 juin : Bruxelles aux mille visages
auteur: mehdi bouttier

Le soleil brille sur le parc d’Osseghem et la 33e édition de Couleur Café démarre sous les meilleurs auspices. Une météo clémente, une foule déjà dense dès l’après- midi, et une programmation ambitieuse qui fait dialoguer la scène locale avec des têtes d’affiche internationales. De MAVEE à Little Simz, retour sur une journée qui a célébré toutes les nuances d’un Bruxelles ouvert, rythmé et furieusement vivant.
MAVEE, l’énergie d’une étoile montante
Dès 17h15, la FOX Stage s’est enflammée avec MAVEE. Entourée de danseurs dans une scénographie chorégraphiée de bout en bout, la chanteuse bruxelloise a délivré un show galvanisant, entre sensualité maîtrisée et énergie débordante. Sa présence scénique évoque la Ciara des grands jours, et son R&B contemporain imprégné de neosoul et de pop, font d’elle une artiste à suivre de très près. Une performance ambitieuse et
généreuse qui a mis la barre haute dès le début d’après-midi.
Baloji, le geste total
À peine le temps de souffler que la Red Stage accueillait Baloji, figure incontournable du hip-hop belge devenu artiste pluridisciplinaire. Né à Lubumbashi, formé à Liège, il navigue entre poésie, stylisme et mise en scène musicale. Entouré de choristes et musiciens, il livre un concert vibrant, mêlant rumba congolaise, électro et funk, avec un sens aigu du détail — dans la musique comme dans les tenues. Entre boubous réinventés et couvre- chefs excentriques, Baloji rend un hommage fort et stylisé au Congo, où chaque morceau devient un tableau mouvant.
Son interprétation très théâtrale, s’est aussi ancrée dans le présent, lorsque l’artiste a pris la parole pour revenir sur l’épisode de sa performance pour COLORS. En cause, sa tenue, inspirée des mères africaines, lui a valu une vague de haine. Dénonçant ce harcèlement, Baloji a expliqué avoir porté plainte pour « ne pas laisser l’impunité gagner » ! Un vibrant discours engagé et précieux qui a été vivement salué par le public. Puis, l’orchestre a joué « Matrone » et la musique s’est encore révélé comme unificatrice d’une foule en liesse.
Tawsen, entre spleen et séduction
Sur la FOX Stage, Tawsen a rassemblé une foule dense, suspendue à son flow doux et mélodique. Le chanteur-rappeur bruxellois navigue entre langues (français, arabe) et styles (rap mélodique, chaabi sentimentale et refrains dansants), dans une ambiance à la fois introspective et entraînante. Une performance sensible, en clair-obscur, portée par une sincérité palpable, Tawsen a prouvé qu’il peut captiver une foule tout en restant introspectif.
DYSTINCT, la pop mondialisée
À 20h, retour à la Red Stage avec DYSTINCT, autre fierté belgo-marocaine, et l’une des étoiles montantes de la pop hybride. À mi-chemin entre Raï sentimental, afro-pop solaire et pop-rap, son set est une vraie traversée des genres. Entouré de musiciens solides, grâce aux riffs de guitare façon rumba, des refrains dansants et des vocalises raï, DYSTINCT propose un vrai voyage musical, plus profond que les tubes qui l’ont consacré à ce rang.
Le concert se termine en mode « quart d’heure américain », les « Tek Tek », « Spider », et surtout « Ghazali », hymne de la dernière Coupe du Monde sont repris dans une atmosphère collective euphorique. Le style est parfois un peu grossier mais l’énergie fédératrice unique consacre DYSTINCT à la croisée des continents et des générations.
Little Simz, classe absolue
Si un moment devait être retenu comme le sommet de la soirée, ce serait sans doute le passage de Little Simz sur la Red Stage. Avec sa prestation, la Londonienne n’a pas volé son statut de meilleure rappeuse de sa génération. Coiffée d’un bob rasta, elle irradiait la scène d’une énergie à la fois tranquille et puissante. Accompagnée d’un groupe de musiciens virtuoses, elle a déroulé son répertoire dense, poétique, rageur, intime et lumineux à la fois. Enchaînant les titres « Introvert », « Selfish », « Venom », le public était suspendu à ses mots, à son flow chirurgical, à son charisme sobre. La classe jusqu’au bout, elle a invité une fan sur scène, pour interpréter le refrain du morceau « Woman », pour un moment suspendu dans le temps.
Véritable clou du show, « Gorilla », a été repris en chœur dans une ferveur collective rare. Little Simz, c’est l’exigence artistique au service de l’authenticité.
Pa Salieu, enragé jusqu’à la clôture
Minuit. La nuit est tombée sur le parc, mais l’énergie ne faiblit pas. C’est Pa Salieu, le plus gambien des rappeurs britannique qui vient conclure cette journée sur la Green Stage. Son style, mélange de UK rap, d’influences africaines bien sûr mais aussi jamaïcaine, frappe fort. Sa voix râpeuse et ses beats abrasifs tiennent la foule en tension. Si le show souffre par moments d’un certain manque de relief, l’énergie brute de l’artiste reste communicative. Une sortie de scène frontale et sans concession.